Mise à jour de janvier 2017 : L'arrêté du 19 décembre 2017 vient autoriser la crémation pour les personnes porteuses de ce type de stimulateur cardiaque sans avoir à recourir à son retrait préalable.
Le sujet est apparu début décembre 2016, lorsque la 1ère famille a être confrontée à l’impossibilité d’organiser les funérailles d’un proche équipé du dernier pacemaker miniature de l’entreprise Medtonic, s’est fait connaître dans la presse.
Le problème : la sortie du 1er pacemaker suffisamment petit pour se loger directement dans le cœur versus l’obligation légale de retirer tout pacemaker pour procéder aux obsèques.
Voici le témoignage de la famille qui s’est retrouvée, la 1ère, confrontée à ce problème insoluble :
«Nous sommes dans une situation impossible. Notre sœur, notre mère, est décédée le 22 novembre dernier et ses obsèques ne peuvent être organisées. On lui avait implanté il y a peu, au CHU de Tours, un nouveau modèle miniature de pacemaker au sein même de son cœur. Le fabricant dit que son matériel est compatible avec l’incinération ou l’inhumation. Or, à Bourges, les différentes autorités nous affirment le contraire.
C’est une somme de difficultés chaotiques, une forme de manque de respect. Les différentes parties concernées (le fabricant, les pompes funèbres, les services de l’État) nous annoncent tour à tour l’impossibilité technique (puis légale) du retrait du pacemaker par un chirurgien; le refus réitéré du procureur de la République de mandater un médecin légiste pour ce cas de mort naturelle reconnue par le Samu 18; l’impossibilité légale de faire ce geste par un thanatopracteur; le refus de la mairie d’autoriser la fermeture du cercueil et donc tout déplacement permettant éventuellement de faire cette crémation dans un autre crématorium…
Notre mère, notre sœur se trouve face à un trou noir, véritable vide juridique sans solution aucune. Son corps doit être conservé sine fine en chambre funéraire puis prochainement en “cellule négative”…Notre famille, effondrée et meurtrie, se voit ainsi refuser: toutes obsèques, et cérémonie religieuse catholique; tout adieu digne de la société_;_ tout travail de deuil face à l’inconnu…»
Il s’agit donc de la firme Medtronic spécialisée dans les stimulateurs cardiaques qui vient de lancer un nouveau modèle : le Micra Medtronic.
Ce stimulateur est le 1er à être autant miniaturisé, sans sonde, et qui peut être implanté au sein des cavités cardiaque via la veine fémorale. Ce dispositif est autorisé en France depuis le 18 octobre 2016 par la Haute Autorité de Santé.
Outre l’aspect beaucoup moins invasif et dérangeant au quotidien pour le porteur du dispositif, le principal intérêt réside dans le temps de pose qui n’est que d’une vingtaine de minutes, couplé à une durée de vie de l’appareil estimée à une douzaine d’années.
«Les systèmes sans sonde, c’est le futur. Le jour où ce sera remboursé, je ne mettrai plus que ça. Cela va extrêmement vite: dans les cinq ou dix ans, on ne mettra plus que ça», expliquait en janvier dernier le Dr Philippe Ritter (CHU de Bordeaux), lors d’une conférence de presse de Medtronic.
L’appareil a obtenu le marquage CE en avril 2015. Une vingtaine de centres français ont été formés à l’implantation de ce matériel qui entend occuper une place importante dans un marché important : tous stimulateurs confondus, environ 66.000 implantations sont réalisées chaque année en France y compris les remplacements.
2 000 modèles Micra Medtronic ont déjà été implantés dans l’Union européenne. Mais on découvre à peine un problème qui va bientôt devenir primordial : l’impossibilité d’organiser des obsèques pour les porteurs de ce dispositif.
En effet, il est obligatoire de retirer tout dispositif possédant une pile avant de procéder à un enterrement ou à une crémation. Dans le cas d’une crémation, le risque n’est ni plus ni moins que l’explosion de la pile, et donc du crématorium. Concernant un enterrement, le risque réside dans une pollution des sols à cause des produits chimiques contenus dans les piles.
Le retrait est exposé par deux articles du code général des collectivités territoriales:
Article 2213-15 : «Avant son inhumation ou sa crémation, le corps d’une personne décédée est mis en bière.
[…] Si la personne décédée était porteuse d’une prothèse fonctionnant au moyen d’une pile, un médecin ou un thanatopracteur atteste de la récupération de l’appareil avant la mise en bière.
Article 2213-34 : «La crémation est autorisée par le maire de la commune de décès ou, s’il y a eu transport du corps avant mise en bière, du lieu de fermeture du cercueil. Cette autorisation est accordée sur les justifications suivantes. […] 3° Le cas échéant, l’attestation du médecin ou du thanatopracteur prévue au troisième alinéa de l’article R. 2213-15.
La difficulté tient, ici, paradoxalement, à la miniaturisation du nouveau pacemaker et à sa situation au sein du corps. Jusqu’ici le retrait du dispositif, placé en sous-cutané, ne posait aucun problème pour le thanatopracteur. Il en va tout différemment avec le Micra Medtronic dont l’explantation réclame un geste chirurgical invasif que personne ne semble, en pratique, disposé à pratiquer.
Seuls un médecin ou un thanatopracteur peuvent effectuer cette opération. Le thanatopracteur a refusé : enlever un pacemaker dans un cœur n’est plus de sa compétence. Le chirurgien du CHU qui l’avait placé n’a été prévenu qu’après quarante-huit heures : trop tard, il ne pouvait plus toucher au cadavre. Et le procureur de Bourges a refusé par deux fois de désigner un médecin légiste pour effectuer l’opération : normal, il ne s’agissait pas d’une mort suspecte.
Chez Medtronic, on assure pourtant que le modèle Micra a justement été conçu pour ne plus quitter le corps des patients après l’implantation, même en cas de décès : « Il peut être incinéré dans des crématoriums standards sans provoquer de bruits dérangeants […] ou de dommages », a expliqué Medtronic, précisant même que des tests montraient « que les risques n’existent plus ».
Seulement les tests ont été réalisés par un laboratoire américain indépendant et n’ont pas encore été pris en compte par la législation française : « La direction générale de la Santé a souhaité reprendre l’expertise réalisée aux États-Unis et la faire expérimenter par un laboratoire spécialisé. Cela prendra du temps, peut-être quelques mois, avant de modifier la réglementation », détaille Medtronic.